Thèmes

Fondements philosophiques

La considération pour la vie animale, le souci de ne pas faire souffrir les animaux, de les épargner et de les protéger apparaissent (dans le texte et la vie de Schweitzer) comme une application immédiate du principe éthique du respect pour la vie. En effet, tout doit se conclure pour chacun de cette réalité première: que chacun est vie parmi la vie, jeté à même la vie au milieu d'une infinité de vies. L'être humain qui parle et qui s'explique de cette façon est saisi là dans sa nudité originelle d'être vivant, d'être-de-la-vie, avant d'être considéré comme "roseau pensant" ou sujet parlant ou encore être-de-la-culture, homo sapiens et homo faber apte à fabriquer des outils et à transmettre ses techniques. Toutes ces déterminations ont leur valeur et sont essentielles pour l'anthropologie, la connaissance que l'homme peut avoir de lui-même, mais elles sont secondes par rapport à la réalité physique - et métaphysique - primordiale de son existence d'être vivant qui veut vivre...

De la conscience de cette réalité, qu'est l'appartenance et la participation des humains à la vie, découle - logiquement - la conscience d'une égalité entre toutes les "créatures" en tant que créatures, en tant que provenant toutes d'une même mystérieuse, insondable origine ou, dit autrement: en tant que rien provenant de Rien. De cette égalité, d'origine et de sort final, de sens ou d'insignifiance, c'est comme on voudra s'exprimer, résulte, peut résulter, et soit dit par métaphore, la conscience d'une fraternité: "animaux et plantes, nos frères, nos soeurs". Schweitzer avait été très tôt émerveillé par la pensée de François d'Assise et il expliquera plusieurs fois que ce que celui-ci avait annoncé sur un mode poétique et comme une perspective du royaume des cieux, lui l'énonçait sur un mode philosophique, dans l'éthique et pour une pratique, sinon même une politique.