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Sermon du 3e dimanche de l’Avent 1908 (extrait)
Pour nous autres citadins du XXe siècle, le danger est grand de ne rien comprendre au problème des relations entre l'homme et les créatures animales. Un petit nombre seulement d'entre nous possède tout au plus un chien; quant à la vache dont nous buvons quotidiennement le lait, nous ne l'avons jamais aperçue! Notre existence de citadins a érigé entre nous et les animaux comme une muraille de Chine. Les enfants qui grandissent dans nos appartements ne peuvent apprendre, comme ceux élevés à la campagne, ce qui fait la personnalité et l'affectivité profonde de chaque animal. Il leur manquera toujours ce don de compréhension et cette patience indulgente que l'on n'acquiert qu'à la ferme, dans un milieu rural. Nous restons complètement étrangers au sort des animaux et la plupart d'entre nous perdent tout sentiment de responsabilité devant les souffrances que les hommes civilisés leur infligent. Certains calment leur conscience en se disant qu'il existe bien des Sociétés protectrices des animaux et une police qui veille au respect de la loi.
Mais celui qui regarde autour de lui sera tiré de sa quiétude lorsqu'il se rendra compte de tout ce qui se passe et que personne ne se mobilise sérieusement pour dénoncer des scandales quotidiens.
Tous, par exemple, nous étions sûrs et certains que dans nos abattoirs tout se passe selon les règles, tant le slogan "Strasbourg, ville modèle à tous égards" s'était profondément infiltré dans nos esprits. Nous étions donc convaincus qu'à l'abattoir les animaux étaient sacrifiés avec un maximum de précautions qui leur ôtent toute appréhension et évitent les souffrances inutiles - jusqu'à ce que, l'été dernier, quelqu'un soit allé voir de plus près et ait publié le résultat de son enquête. Et voilà que nous apprenons que nos abattoirs sont un véritable enfer pour les bestiaux et que les procédés employés sont indignes d'une institution moderne.